Hello hello !
'me suis enfin débarrassé de ma vieille Versys qui dormait dans le garage pour faire l'acquisition d'un meurtrier Gas gas 300 TXT Racing!
Je garde toujours mon Himalayan que j'aime trop, mais je peux maintenant passer sur la chèvre écarlate hystérique quand vraiment, vraiment ça passe plus en Himalayan. (Il en faut pourtant, j'suis sacrément con.)
Voilà donc un petit retour sur la bestiole, sachant que ce sera du point de vue d'un couillon qui n'y connaît rien en trial, mon seul outil de comparaison ce sera des trails, donc je m'abstiendrai de comparer tout court.
Il y avait un bon milliard d'enduro moins chers qu'un trial (et avec une bien meilleure possibilité de revente) sur leboncoin, mais je voulais vraiment un trial. Non pas que je veuille faire de la zone, loin de là. L'objectif était simplement de continuer à explorer la nature environnante, mais sans aucune limite mécanique. Alors certains penseront qu'un enduro ça passe partout là où un trial passe, je m'investirai dans ce débat quand j'aurai laissé derrière moi assez d'enduristes en larmes pour être bien certain que le trial, c'est le seul dernier bastion avant l'escalade.
Premier tour de roue :Deux kilos de popo descendus dans chaque botte. Rien à ajouter.
Second essai :Seulement 500g de crotte de motard répartis dans chaque botte, y'a du mieux.
Le moteur 2T semble tout droit sorti des enfers. Si une petite bosse sur le chemin à le malheur de faire bouger d'un millimètre ta main sur la poignée de gaz, tes bras sont arrachés par la bête qui essaie de partir sans toi. Une accélération un tout petit trop arrogante, et l'avant se lève dans un nuage de petits pets anxieux de ta part.
Ca va que j'aime l'adrénaline autant que le café, sinon c'est sûr, j'aurai revendu illico cette bestiole qui te hurle dans les tripes à la manière d'un film d'horreur.
Et j'ai bien fait de la garder, parce qu'à la ballade suivante, la terreur s'est transformée en fun en une fraction de seconde.
Troisième sortie : L'épiphanie. Comme un gros lâche, j'ai appris à ne pas contrarier ma monture. J'accélère comme je parle à ma femme : Beaucoup de pincettes, on brusque pas, et en cas de doute, on la ferme.
Ca m'a permis de m'aventurer sur des terrains un peu plus difficiles sans avoir l'impression de jouer ma vie. Je dose, je choisis bien mes trajectoires, je fais preuve de prudence et d'humilité.
Pis là. En remontant un chemin tout cabossé, v'la t'y pas que j'vois un gros rocher su'l'chemin. Une bonne grosse marche sur laquelle j'aurai laissé le sabot moteur de l'Himalayan.
J'me dis : C'est bon, je fais preuve de raisonnabilité et d'intelligence, je peux profiter de cet état d'esprit de documentaliste mal dans sa peau pour risquer un petit franchissement.
P'tit coup de gaz, la roue avant passe, et...
J'ai serré si fort les fesses que j'aurais pu casser une noix si elle eut été placée dans mon sillon inter-fessier.
La roue avant est passée mais elle a décollé du sol dans la manœuvre et je suis monté sur le rocher en roue arrière, une seconde passe qui semble durer une éternité en suspension dans les airs, et l'avant chute lourdement dans un hurlement de motard qui a du casser les burnes à tous les écureuils de la forêt.
Parce que, un peu de contexte, j'avais jamais fait de wheeling de ma vie. Et expérimenter ça pour la première fois, dans une côte déglinguée, en franchissant une marche, ben ça te remets bien vite à ta place de grosse miquette.
Ce hurlement, c'était un mélange d'euphorie et de soulagement d'avoir survécu à ce dépucelage non consenti.
Je m'arrête une seconde, et je digère ce qui vient de se passer : J'ai perdu le contrôle de ma machine, et en fin de compte elle voulait pas me tuer, mais simplement exploser rageusement cette marche de m...e pour aller au delà, plus loin, plus haut, plus fort.
Et en fait, le 300 TXT, c'est ça, rien de plus. C'est une valkyrie furieuse qui demande qu'à s'envoler vers l'espace inter-galactique du tout-terrain :
Le trial de clochard.
Le trial de clochard c'est une nouvelle philosophie que j'ai découvert après cet événement. Ça consiste à chercher les endroits les plus pourrave que tu puisses trouver, sur lesquels t’emmènerait rien d'autre que tes pires ennemis, et à rouler comme un gros crado, en te mangeant des branches dans les yeux, des cale-pieds dans les tibias, en te brûlant le fiac sur le pot, et en te vautrant dans la boue mais en repartant sans même caler ou lâcher le guidon.
Le trial de clochard, c'est chercher la m...e pour rien, rouler là où la trace est la plus dangereuse, passer sur des gros cailloux roulants exprès juste parce que c'est drôle, faire des franchissement toujours pas maîtrisés sur une roue arrière parce que c'est le truc le plus drôle du monde.
En résumé,
le trial de clochard, c'est la peur qui n'existe plus. Seul la volonté d'aller cherche le pire de ce que la nature peut te faire subir subsiste. Et la récompense de tout ça ?
Les moments les plus fun que j'ai jamais connu de toute ma vie.
J'ai jamais autant hurlé et rigolé dans mon casque. Jamais eu autant de peps après une sortie horrible. Jamais eu autant la banane en enlevant mon casque gorgé de sueur.
Le trial, c'est juste une moto sans les inconvénients de la moto.
C'est un bidule magique qui transforme la bouillasse en or, la souffrance en euphorie.
Avant de faire l'achat, je m'étais renseigné sur le trial, j'ai lu partout que "oui le trial c'est quand même plus dur que l'enduro, ça demande de la pratique et de la maîtrise avant de faire quoi que ce soit, blablabla".
Ben en fait non. Tu poses le pied par terre (ce qui équivaut à une faute en compétition) et t'es le roi du monde. Tu peut pivoter, redresser, réajuster, incliner, repartir. Tu fais semblant de pomper la fourche pour donner l'impression que tu sais faire des wheeling, et bam Tu franchis des troncs d'arbres sur le chemin. T'avances sans conviction sur un mur et la moto fais tout le travail sans même esquisser un rechignement.
Si je devais synthétiser l'essai du gas gas 300 TXT-R, ce serait comme ça :
La moto est plus forte que toi. Tu seras jamais plus puissant, plus rapide, plus agile, la moto est juste meilleure que la raclure de motards que t'es.
Mais c'est pas une tare, c'est une bénédiction. Parce que ça veut dire que si tu lâche assez prise, si tu oublies cette idée de contrôle, bercé par le ronron de ce 2 temps torride et bienveillant, cette moto te guidera à travers les pires obstacles que seul, tu n'aurais jamais osé franchir. Et seul, tu n'es pas. Cette monture, dotée d'une volonté qui lui est propre et qui t'échappe, navigue à tes côtés dans les ornières ravagées du vrai tout terrain : Celui qui te rappelles que tu n'es rien, mais qui l'espace d'un instant, te donnes l'impression d'exister, pour de vrai.